Révolution ou Guerre n°11

(Semestriel - février 2019)

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Lénine et... les gilets jaunes ?

Le caractère inédit du mouvement des gilets jaunes a provoqué de nombreux questionnements parmi les révolutionnaires de par ses caractéristiques propres que nous pouvons qualifier, pour les résumer, d’interclassistes. Nous avons reçu un certain nombre de critiques suite à notre publication et notre soutien à la première prise de position du PCI-Le Prolétaire (http://igcl.org/Gilets-Jaunes-L-interclassisme-est). Parmi celles-ci, le groupe Matière et Révolution (http://www.matierevolution.fr/) nous a renvoyé au texte de Lénine sur le débat de 1916 sur le droit des nations à l’auto-détermination. Bien que ce texte se rapporte à la question nationale tel qu’elle pouvait se poser alors, il n’en reste pas moins que le passage suivant vaut d’être lu et réfléchi face aux questionnements et problèmes que les ’gilets jaunes’ soulèvent aujourd’hui.

« Quiconque attend une révolution sociale "pure" ne vivra jamais assez longtemps pour la voir. Il n’est qu’un révolutionnaire en paroles qui ne comprend rien à ce qu’est une véritable révolution. La révolution russe de 1905 a été une révolution démocratique bourgeoise. Elle a consisté en une série de batailles livrées par toutes les classes, groupes et éléments mécontents de la population. Parmi eux, il y avait des masses aux préjugés les plus barbares, luttant pour les objectifs les plus vagues et les plus fantastiques, il y avait des groupuscules qui recevaient de l’argent japonais, il y avait des spéculateurs et des aventuriers, etc. Objectivement, le mouvement des masses ébranlait le tsarisme et frayait la voie à la démocratie, et c’est pourquoi les ouvriers conscients étaient à sa tête.

La révolution socialiste en Europe ne peut pas être autre chose que l’explosion de la lutte de masse des opprimés et mécontents de toute espèce. Des éléments de la petite bourgeoisie et des ouvriers arriérés y participeront inévitablement – sans cette participation, la lutte de masse n’est pas possible, aucune révolution n’est possible – et, tout aussi inévitablement, ils apporteront au mouvement leurs préjugés, leurs fantaisies réactionnaires, leurs faiblesses et leurs erreurs. Mais, objectivement, ils s’attaqueront au capital, et l’avant-garde consciente de la révolution, le prolétariat avancé, qui exprimera cette vérité objective d’une lutte de masse disparate, discordante, bigarrée, à première vue sans unité, pourra l’unir et l’orienter, conquérir le pouvoir, s’emparer des banques, exproprier les trusts haïs de tous (bien que pour des raisons différentes !) et réaliser d’autres mesures dictatoriales dont l’ensemble aura pour résultat le renversement de la bourgeoisie et la victoire du socialisme, laquelle ne ’s’épurera’ pas d’emblée, tant s’en faut, des scories petites-bourgeoises »

Lénine, Bilan d’une discussion sur le droit des nations à disposer d’elles-mêmes, 1916 [1].

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