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Communiqué sur la grève du secteur public au Québec - Canada (6 Novembre 2023)
Ne pas rester derrière les mots d’ordre de division des syndicats !
Tous en grève sans attendre et tous métiers et secteurs unis et en même temps !
Peu d’informations sont données au niveau international sur le début de la « grève illimitée » dans le secteur public appelée par les syndicats dans la province canadienne du Québec. Plus de 420 000 prolétaires sont appelés à la grève pour des augmentations de salaire à partir de demain 7 novembre. L’appel est lancé par toute une cohorte de syndicats de métier et autres qui font partie du Front commun suite à un vote légal. 95 % des votants ont approuvé le principe d’une « grève illimitée » au mois d’octobre. Pour les militants, les prolétaires et les lecteurs non nord américains, précisons d’entrée que la « grève illimitée » signifie en fait l’organisation par les syndicats de grèves tournantes qui ne touchent même pas tout un secteur, ni même un corps de métier, pas même bien souvent un lieu de travail en même temps. La réglementation canadienne et québecoise du travail est à l’image de celle prévalant aux États-Unis qui est basée en grande partie sur le système du « closed-shop », le syndicat gérant indirectement, voire directement dans certains cas, l’embauche des travailleurs. Mais surtout ce « droit syndical » interdit de fait toute extension et unification de la lutte prolétarienne au-delà des secteurs et corporations. Seules sont autorisées les grèves… inefficaces. Et si besoin, si le processus légal de négociation syndicats-direction ne suffit pas, l’État interdira la grève comme ce fut le cas aux États-Unis dans les chemins de fer en 2022 ; ou encore comme en furent menacés les dockers de la côté ouest du canada [1].
Le mouvement qui commence demain et devrait s’amplifier les 21, 22 et 23 novembre est d’entrée saucissonné et saboté par les syndicats. Le Front commun est formé par les principales centrales syndicales. À son appel, les concierges et enseignants des écoles et des employés d’hôpitaux seront en grève, dès demain, pour quelques heures. Ils reprendront le travail à 10h30. Voilà la « grève illimitée » à la sauce syndical. Les 8 et 9 novembre, les infirmières à l’appel du FIC, syndicat des infirmières qui ne fait pas partie du Front commun, seront en grève deux jours. Et les enseignements de la FAE commenceront leur grève le 23 novembre, il y devrait y avoir à ce moment là plus de 500 000 travailleurs en grève. Donc des grèves tournantes et perlées, des syndicats « divisés », aucun appel au secteur privé et des assemblées contrôlées par les syndicats et certains d’entre eux se joignent aux manifestations nationalistes et pacifistes pro-palestine. Le cadre imposé par les syndicats et l’État laisse présager que ce mouvement est déjà totalement sous contrôle et qu’il sera « inefficace » du point de vue de classe. Pour autant, il exprime une certaine combativité du prolétariat et une bataille de classe devant laquelle les communistes ne peuvent rester inactifs et indifférents.
Le tract que nous republions ci-après est diffusé dans les manifestations et les lieux de travail. Il est l’émanation du comité No War But Class War de Montréal. Il fut rédigé en août dernier à l’annonce de cette mobilisation syndicale. Il avertissait déjà les travailleurs contre le sabotage syndical visant à étouffer et saboter toute réaction a minima « efficace » contre les attaques, en particulier la baisse des salaires provoquée par l’inflation. Outre les orientations de lutte avancées, le mérite de ce tract est de souligner la signification historique des luttes ouvrières de résistance aujourd’hui : « Cette lutte pour l’augmentation des salaires contribue objectivement à ralentir la marche vers la guerre généralisée. » La formule peut sembler rapide et mécanique. Peut-être aurait-elle mériter un argumentaire plus conséquent. Pour autant, il n’en reste pas moins vrai que les luttes ouvrières d’aujourd’hui ne sont plus seulement déterminées par la crise – la défense du capital national contre les rivaux au plan économique – mais aussi par les besoins, plus ou moins directs selon les pays, des poussées vers la guerre généralisée ; en particulier la nécessité de développer des économies de guerre et de réarmer. Dans cette situation, toute lutte ouvrière représente objectivement, et quelle qu’en soit la conscience des prolétaires en lutte, une dynamique d’opposition à la crise et à la marche vers la guerre de son propre capital national. Et cela aux plans économiques tout comme au plan idéologique en tendant, et seulement en tendant, à rompre avec le cadre de la défense du capital national et de l’unité nationale avec sa propre bourgeoisie.
Quant aux orientations avancées par le tract, elles restent globalement valables même si elles sont aujourd’hui, ce lundi premier jour de la grève et de la mobilisation, en retard sur les nécessités du mouvement. Il ne s’agit plus tant, de manière prioritaire, d’appeler à former des comités de lutte ou autres pour préparer et encourager à une grève véritablement « illimitée et unie » et à son extension au-delà du secteur public. Aujourd’hui, aux premier jours du mouvement, il s’agit :
d’appeler directement tous les métiers et corporations du secteur public à se mettre en grève en même temps et tous ensemble ;
de les appeler à étendre la grève au-delà du secteur public, vers le privé ;
d’appeler l’ensemble des prolétaires du Québec, du public et du privé, à la grève immédiate et illimitée en rompant avec l’unité national et l’interdiction des grèves réelles.
Et si comités de lutte il y a, il leur appartient de centrer toute leur intervention sur ces mots d’ordre.
Un Front des Travailleurs, Pas un Front des Syndicats
(tract du comité NWBCW de Montréal)
Les travailleurs et travailleuses du secteur public du Québec se préparent à affronter l’État avec des revendications salariales visant à contrer les effets de l’inflation, les attaques contre les retraites et de meilleurs conditions de travail. Pour 2023 : une hausse de 100 $ par semaine pour l’ensemble des travailleuses et des travailleur ou l’application d’un mécanisme permanent d’indexation annuelle basé sur l’indice des prix à la consommation (IPC) plus une hausse de 2%, selon la formule la plus avantageuse : en 2024 : application d’un mécanisme permanent d’indexation annuelle basé sur l’IPC, une hausse de 3 %:en 2025 : application d’un mécanisme permanent d’indexation annuelle basé sur l’IPC, plus une hausse de 4 %. D’autres demandes sont faites par le FC : sur la retraite, les droits parentaux, les disparités régionales et les assurances collectives.
Le capital et les capitalistes de chaque pays s’attaquent à l’ensemble de la classe ouvrière, sans distinction de syndicat ou de statut, de salarié du privé ou du public, de travailleur à temps plein ou à temps partiel, de retraité ou d’étudiant. Cette lutte s’inscrit dans un contexte mondial où le capital cherche à imposer des sacrifices croissants à tous les prolétaires. Cette lutte pour l’augmentation des salaires contribue objectivement à ralentir la marche vers la guerre généralisée. D’un point de vue global, cette lutte est en corrélation avec la mobilisation du capital dans une économie de guerre impérialiste. Face à la baisse de sa rentabilité, le capital ne peut offrir que la misère et le militarisme.
À l’exception du Front Commun de 1972 dans lequel les syndicats ont perdu partiellement le contrôle du mouvement, tous ont vu une des centrales syndicales faire des compromis lors des négociations et abandonner les autres centrales. La lutte des FC depuis des années se déroulent de la même façon : dénonciations des offres de l’état, conférences de presse en série, actions futiles et inutiles (port de chandails, brassard noir, pétition, etc.) manifestations très encadrées (flûtes criardes, tambours assourdissants et slogans de compromis ou réformistes), grèvettes de une à quelques jours par secteur ou par syndicat, aucun lien de lutte avec les travailleurs et travailleuses du secteur privé ou avec ceux et celles des autres provinces canadiennes et finalement entente à rabais entre l’État et les autres syndicats qui n’ont pas quitté le FC. Parfois la menace ou le passage d’une loi spéciale met fin au FC. Alors la plupart des centrales recommandent à leurs membres de changer de gouvernement et de voter PQ ou de voter QS ou détournent la lutte vers les tribunaux en contestant la loi sur une période qui peut durer des années. Non content d’avoir saboter la lutte des travailleurs et travailleuses du secteur public les syndicat mettent de l’avant le parlement, les campagnes électorales, le système judiciaire et de manière générale la démocratie bourgeoise qui ne peuvent plus être utilisés par le prolétariat pour son affirmation en tant que classe et pour le développement de ses luttes. Tout appel à participer au processus électoral et à voter ne fait que renforcer la mystification présentant ces élections comme un véritable choix pour les exploités.
Que faire face à ce sabotage de la lutte par les syndicats ?
Il faut préparer la grève générale en créant des comités de grève ou de lutte réunissant tous les travailleurs, quelle que soit leur appartenance syndicale, qu’ils soient syndiqués ou non, et quelle que soit leur fonction. C’est le premier moyen de lutter contre les divisions et l’affaiblissement de nos forces. Nous devons participer aux réunions syndicales et faire des propositions pour contrer la division et le sabotage des syndicats, surtout s’ils reviennent avec les mêmes propositions qui ont échoué dans le passé : actions isolées, grèves sectorielles, grèves d’un ou deux jours et même de quelques heures par syndicat, moratoire, demande d’arbitrage et de conciliation. Ces deux dernières propositions sont également avancées par le gouvernement. Nous devrions envoyer des délégations sur différents lieux de travail, dans des assemblées générales militantes ; en bref, utiliser tous les moyens qui contribuent à unifier notre lutte commune pour la défense de nos conditions de vie et de travail. Les travailleurs doivent s’inspirer des leçons tirées des luttes précédentes. En particulier, les succès de la formation de délégations, de l’extension des grèves et de la formation de leurs propres comités, comme ce fut le cas en 1972, ainsi que tout ce qui est à la disposition des plus militants de la classe aujourd’hui.
Ce qui est à mettre de l’avant, c’est un front commun des travailleurs, et non des syndicats. Il faut résister en étendant et unifiant le combat contre le capital et les forces de l’appareil d’État qui le soutiennent et le défendent.
NWBCW-Montréal (No War But Class War)
email : nwbcwmontreal@gmail.com
Notes:
[1] . cf. RG #25, Sur la récente grève des dockers de Colombie-Britannique, http://www.igcl.org/Sur-la-recente-greve-des-dockers