Révolution ou guerre n°25

(Septembre 2023)

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La voie vers la guerre mondiale (CWO-TCI)

Nous reproduisons ci-après un article du bulletin Aurora de la Communist Workers Organization, le groupe de la Tendance communiste internationaliste (TCI) en Grande Bretagne. Il aurait très bien pu servir d’éditorial pour ce numéro de la revue. Nous le faisons suivre d’un compte-rendu, rapide, de la grève des dockers de la côte Ouest du Canada. Il vient illustrer comment la bourgeoisie, gouvernement, syndicats et appareil répressif, hésite encore moins qu’auparavant, avant la guerre en Ukraine, à interdire et réprimer toute lutte ouvrière un tant soit peu significative. Tous les appareils d’État se mettent en ordre de bataille en vue d’imposer au prolétariat et, plus largement, aux populations, la marche à la guerre impérialiste généralisée. En particulier, l’arme idéologique est essentielle pour justifier le choix d’un camp contre l’autre. La bourgeoisie américaine l’a bien compris. Au point que le Pentagone tout comme l’Otan se font aujourd’hui les chantres du féminisme et des droits LGBTQ, comme l’illustre notre article sur le sujet. Outre de tendre à provoquer des réactions ouvrières, l’exacerbation des antagonismes sociaux, du fait de la crise et de la guerre, précipite les révoltes en tout genre, comme celle qui a incendié les villes françaises durant cinq jours en juin dernier suite à l’assassinat d’un jeune par la police.
Enfin, nous reproduisons une contribution réalisée par
Battaglia comunista, l’organe de la TCI en Italie sur les nouvelles technologies telle ChatGPT. Il rappelle la position marxiste et de classe face aux nouvelles technologies, la robotique ou automatisation, qui ne changent rien au rapport et au mode de production capitaliste, en particulier à la nécessité pour celui-ci d’exploiter la force de travail vivant pour continuer l’accumulation du capital et la production de la plus-value. Les nouvelles technologies liées à la robotique et qui font exploser la productivité du travail, exacerbent toujours plus la contradiction et le déséquilibre croissant entre le travail vivant – les prolétaires – et le travail mort – les machines et les robots. Il en résulte une aggravation encore plus accélérée de la baisse tendancielle du taux de profit capitaliste. Les contradictions du capital – loin de s’estomper – s’approfondissent. Elles ne peuvent que le précipiter encore plus dans l’impasse historique qui mène à… la guerre généralisée.

La voie vers la guerre mondiale (CWO-TCI)

Le mois de juin a marqué le début de la contre-offensive de printemps en Ukraine. Les premiers résultats sont là : tout au plus quelques dizaines de kilomètres carrés de territoire stratégiquement insignifiants ont été échangés contre peut-être des dizaines de milliers de vies humaines. Chaque jour qui passe, l’ensemble de l’opération ressemble de plus en plus à la boucherie insensée de la Première Guerre mondiale.

Malgré cela, nos politiciens et nos médias tentent de nous « rassurer » en nous disant que la victoire est à portée de main – c’est-à-dire tant que « nous » continuons à fournir à l’armée ukrainienne la dernière et la meilleure « aide létale ». À cette fin, les alliés occidentaux de l’Ukraine n’ont cessé de repousser les limites en livrant des armes toujours plus perfectionnées et destructrices sur le champ de bataille. Le mois de juillet a vu le déploiement d’armes à sous-munitions controversées de fabrication américaine, et tout porte à croire qu’un lot d’avions de combat F-16 arrivera en août.

Il est évident que les principaux résultats de ces interventions « humanitaires » seront une prolongation de la guerre, la maximisation des souffrances humaines et l’exacerbation des tensions entre l’Otan et la Russie. Pour sa part, la Russie a été plus qu’heureuse de jouer dans cette spirale d’escalade, Poutine et Medvedev menaçant à plusieurs reprises et effrontément d’utiliser des armes nucléaires en cas d’intervention directe de l’Otan. Pendant ce temps, le groupe Wagner, exilé en Biélorussie après son étrange mutinerie de juin, a mis le gouvernement polonais en état d’alerte. Dix mille soldats supplémentaires de l’armée polonaise – en passe de devenir la plus importante de l’UE – ont été envoyés d’urgence à la frontière biélorusse.

Militarisation du Sahel et de la mer de Chine méridionale

Si le conflit russo-ukrainien continue de faire la une des journaux, il est loin d’être le seul signe de la course vers la guerre généralisée. À la fin du mois de juillet, un coup d’État a été mené à bien au Niger. Ce coup d’État fait suite à des prises de pouvoir militaires similaires au Tchad, au Mali et au Burkina Faso, qui ont toutes eu lieu au cours des deux dernières années. Le dernier coup d’État a immédiatement provoqué la menace d’une invasion de la part de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), pro-occidentale. En réponse, les juntes burkinabé et malienne se sont engagées à aider à la défense du Niger. À l’heure où nous écrivons ces lignes, l’invasion promise n’a pas encore eu lieu, mais la situation est extrêmement précaire.

La quasi-totalité du Sahel est désormais sous le contrôle de juntes militaires, qui semblent s’aligner sur un bloc anti-CEDEAO avec l’encouragement du gouvernement russe. La Russie, qui a déjà pris pied militairement dans la région par l’intermédiaire du groupe Wagner, a donné une impulsion significative à son offensive de charme à destination de l’Afrique lors du récent sommet Russie-Afrique de Saint-Pétersbourg, en promettant à six des pays les plus pauvres du continent 50 000 tonnes de céréales gratuites et une remise de dette d’un montant de 23 milliards de dollars américains. Il semble peu probable que l’Occident laisse se développer un réalignement régional plus poussé sans réaction – après tout, la France et les États-Unis ont des soldats stationnés au Niger et les mines d’uranium nigériennes fournissent 20 % de l’uranium des centrales nucléaires françaises.

Entre-temps, il n’y a aucun signe de désescalade en mer de Chine méridionale. Au cours des cinq dernières années, les gouvernements américain et chinois ont adopté des attitudes de plus en plus belliqueuses sur la question taïwanaise, les deux parties menant des exercices et manœuvres de guerre massive en prévision d’une invasion par la Chine continentale. Contrairement à l’Ukraine, où l’Otan a pu confier à la population locale le rôle de tuer et de mourir, une guerre à propos de Taïwan impliquerait presque certainement la participation active du personnel militaire américain dans des rôles de combat dès le premier jour ; par conséquent, l’escalade vers un conflit mondial pourrait être rapide

Contre la fausse promesse du pacifisme

À première vue, la tendance à la guerre généralisée peut sembler inexplicable. L’humanité ne peut qu’y perdre, et pourtant nous semblons nous en rapprocher chaque jour un peu plus. Cependant, ce n’est pas le résultat d’une pure folie, ni de politiciens et de généraux bornés qui feraient des mauvais choix. Il est une force inéluctable, enracinée dans la recherche de profits toujours plus importants, qui pousse le système capitaliste international vers des crises qui ne peuvent pas être résolues par des moyens pacifiques. Tant que nous vivrons dans ce système, où des États antagonistes s’affrontent pour défendre les intérêts particuliers de chaque capital national, nous continuerons à assister à des conflits sanglants payés par des gens qui n’ont rien à y gagner, à savoir la classe ouvrière mondiale.

L’histoire a montré à maintes reprises qu’une opposition efficace aux guerres impérialistes ne peut prendre la forme d’un simple pacifisme. Après la classe ouvrière russe qui avait pris le pouvoir en 1917, le soulèvement révolutionnaire de la classe ouvrière allemande a finalement mis fin à la Première Guerre mondiale. C’est la menace d’une révolution et d’une guerre civile qui a poussé les puissances européennes à arrêter le massacre pour sauver leur peau. Mais en fin de compte, le capitalisme a survécu. À peine une génération plus tard, la classe ouvrière a de nouveau été massacrée par dizaines de millions lors du cataclysme de la Seconde Guerre mondiale.

La classe ouvrière doit tirer les leçons de l’histoire. Nous devons nous organiser politiquement pour mettre en œuvre notre propre programme qui, loin de nous combattre les uns les autres, consiste à prendre le pouvoir entre nos mains et à mettre fin à la prochaine guerre mondiale avant qu’elle ne commence !

Aurora #64, Communist Workers’ Organisation-TCI

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